Naâman : « La solidarité est la base de l'humanité »

Sa musique est positive et engagée, son flow inimitable : Dream Act a rencontré Naâman, le surdoué du reggae. L'artiste le plus programmé des festivals en 2016, passé par l'Olympia et les Victoires du Reggae, prend aussi le temps de défendre les causes qui lui tiennent à coeur, et multiplie les concerts caritatifs.

Avant de courir les festivals cet été et de finir sa tournée française - les 28 et 29 Septembre au Trianon à Paris -, Naâman nous a parlé engagement et inspiration à travers sa musique. Si le Dieppois ne se considère pas militant, il est humaniste pour sûr. Rencontre.

Naaman

© Emma Birski

Tu es un artiste engagé : tu le prouves une fois de plus avec ton dernier album, Beyond. Pourquoi porter tes engagements en musique ?

Pour moi, c’était une évidence de faire une musique consciente avec un message. Un message durable. "Durable" dans le sens qui peut toujours être porté dans 50 ans, qui aura toujours la même valeur et le même impact. La même universalité.

Je ne suis pas un "militant”, mais je porte des messages dans ma musique. J’essaye aussi de rendre notre commerce le plus...propre possible, de le responsabiliser. Et aussi de solidariser. Ça prend du temps, des années, mais ça se met en place petit à petit.

Tu veux responsabiliser l’industrie musicale avec par exemple un album en papier recyclé plutôt qu’en plastique, et des produits dérivés plus éthiques. C’est important pour toi, la consommation responsable ?

C’est une question de cohérence, tout simplement. C'est à dire que j’ai des aspirations, j’essaie de les mener à bien. Je fais de la musique, "engagée", alors forcément, c’est très important pour moi quand je vends un album de ne pas rajouter du plastique en plus sur la planète !

Ca n’est toujours facile, ça prend du temps, mais la cohérence, c’est très important. Pour tout le monde ! Même si on ne s’en rend pas toujours compte. 

 
La musique - et l’art en général - peut-elle changer le monde ?

Oui, la musique change le monde ! Je pense que toute forme d’art apporte de la beauté au monde, de la douceur, de la poésie... Ça, ça rend le monde meilleur ! La musique a cette force quand ça ne va pas : quand les gens s'engueulent, ils écoutent un petit morceau et tout va mieux (rires)

© Emma Birski


Beyond parle de regarder au-delà. Vers quoi doit-on regarder ?

Vers l’intérieur. Tourner ses yeux vers l’intérieur, c’est la chose qui manque. Aujourd’hui, je pense que toute la dégradation extérieure autour de nous, que ce soit la pollution, la dégradation des conscience...c'est dû à la dégradation interne. L'humanité a du mal à regarder à l’intérieur. La solution ne va pas venir du ciel !

Une fois qu’on fait ce chemin intérieur, qu’on apprend à se connaître, et qu’on apprend à découvrir chaque jour son lien avec l'univers, on a plus aucune volonté de blesser qui que ce soit. Aussi bien la terre, l’environnement… Tout est lié : si on blesse autour de soi, on se blesse soi-même.


I'm alright donne le ton : c’est un appel à la révolution ! 
Ça commence par quoi, le changement ?

Ça commence par soi-même, et surtout d'une volonté. Dans cette époque, on a tendance à se laisser bercer, on a tellement d’options qu’on a du mal à choisir par où aller. Du coup, la volonté est un peu impactée. I’m alright, c’est une revendication à être heureux, mais ça ne vient pas tout seul ! C’est un message pour dire « Ok, c’est pas facile d’être heureux, mais il faut le faire, et tu peux » On influence le monde chaque jour par la volonté. 

On peut tous changer le monde à notre échelle ?

Bien sûr ! Chacun est un vecteur puissant ! De poésie, de beauté… On ne se rend pas compte à quel point chacun est influent. On peut changer la vie de plein de gens chaque jour. Vraiment.

 

Comment faire pour être pionnier dans le changement ?

La solution est au fond de chacun d’entre nous. « Être pionnier » ne veut pas dire avoir l’idée du siècle, mais de suivre son cœur malgré la pression extérieure. Prendre les bonnes décision  par amour et pas par la peur... Aujourd’hui, on a peur de l’avenir, peur de notre financement, du coup on choisit des directions "sécurisantes". « Être pionnier », c’est prendre ses décisions par amour avant tout, "par amour" ça veut dire en écoutant son coeur et son intuition.  (Il réfléchit) Avec altruisme et compassion. 

Comment t’engages-tu au quotidien, au-delà de la musique ?

En dehors de ce qu’on essaye de mettre en place avec Naâman, humainement, l’engagement, c’est être vrai avec soi-même. Ne pas se mentir, ni accepter des choses en se mentant. 

Après, il y a un panel énorme de solutions possibles : par exemple dans sa consommation tous les jours, faire attention à ce qu’on achète pour le bien de l’environnement. Montrer l’exemple quoi. Mais sans vouloir forcer, plutôt incarner l’exemple. En achetant moins de plastique, en choisissant des produits locaux, en aidant les artisans et les petits producteurs... C’est très important.  

Simplicity et Tomorrow appellent à ralentir dans la course au matériel, à profiter du moment présent. Tu aspires à une vie plus simple ? 

Bien sûr la vie simple, c'est un grand soulagement et une grande liberté. Ça n’est pas facile à avoir, car aujourd’hui on est dans l’abondance et, comment dire...un peu forcés par le système. La vie simple c'est une révélation en général. Je pense qu'il faut prendre de la distance avec le système dans lequel on vit. Il faut savoir s’en aller, se couper du monde. Avec les téléphones portables par exemple, c'est super car on est connectés au monde, mais ils sont aussi terribles car on ne sait plus se retrouver avec soi-même.

Mes moments de bonheur intenses, ils sont dans la simplicité et dans « la vie dans vie »... Pas juste nous les hommes, mais la vie au sein de la vie. Comprendre cette interdépendance, et qu'on est tous liés, c’est ça la clé. Rien ne peut marcher tout seul. 

Parfois, il faut un choc pour se détacher de ce système-là, mais ce choc peut venir facilement. Une fois que c'est arrivé, il faut continuer dans cette direction, ne pas laisser ce souvenir comme un bon souvenir de vacances, mais l’intégrer dans son quotidien. 

 

Fervent défenseur de la nature, tu en parles beaucoup dans ta musique. Quel est ton rapport à l’environnement ? 

Ça peut prendre plein de facettes, mais c'est encore cette histoire d’interdépendance. Je me sens tout petit face à la nature. Quand on arrive vraiment dans des moments...des moments « de grâce » où l’on se connecte à la nature, on se rend compte qu’on est minuscule. Et qu’on a vraiment un rôle à jouer !

Ma relation avec a nature, c’est aussi beaucoup d’inspiration : la nature amène beaucoup de réflexion et de réponses. Au niveau de la protection de l’environnement, j'essaie de faire mon maximum de mon côté, mais je suis persuadé que la nature est assez forte pour nous mettre dehors quand il le faudra. Pour ne pas en arriver là, c’est à nous de grandir. La nature, c'est un peu notre miroir.


La solidarité est aussi un thème qui te tient à cœur. 
Pourquoi il y a-t-il désolidarisation et comment se re-solidariser ?
 

Ce manque de solidarité est dû à la peur qui vient au compte-goûte par les médias, par les volontés politiques qui divisent pour gagner… La solidarité est mal vue aujourd’hui ! On peut te mettre en prison si tu sauves la vie de certaines personnes, alors que ça semblait abbérant il y a quelques années. Il faut absolument que ça redevienne évident dans la tête de chacun que bien sûr qu’ on peut, et qu’il faut, être hors la loi quand les lois vont à l’encontre de solidarité. 

On a tous besoin les uns des autres, surtout en ce moment ! Nous, notre richesse occidentale, elle ne va pas durer des décennies. La richesse individuelle de chacun n’est qu’un leurre, elle n’existe pas. Il faut absolument réussir à aller dans l’échange, dans ce qu’on est capable d’offrir et capable de recevoir. Recevoir n’est pas toujours facile non plus.

Il faut que la solidarité redevienne une priorité. C’est la base de l’humanité. Si on met des lois contre la solidarité, on met un gros coup de hache dans le dos l’humanité... C’est le message de Love is allowed : chacun doit retrouver sa liberté d’action. Il faut prendre des décisions par soi-même, ne pas attendre qu’on les prenne pour nous. Être leader de sa vie.


Un conseil pour ceux qui veulent s’engager ?

Je leur dirais qu’il faut se reconnecter avec son soi intérieur. Retrouver la confiance en soi. On est tous magnifiques, on a tous un potentiel énorme. On peut faire tellement, une fois qu’on a lâché tous nos doutes et toutes nos peurs !

Et se souvenir que la vie est magnifique, la vie est d’une richesse et d’une profondeur infinie. On peut en faire beaucoup de choses.

 

Naâman sera en concert les 28 et 29 Septembre 2018 au Trianon à Paris - dernières dates françaises avant 2020. Cet été, il participe à différents festivals : Reggae Sun Ska, le Festival du Bout du Monde, Woodstower...

Son dernier album est disponible ici
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Cécile P.

Article rédigé par :

Cécile P.

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