Mesurer l'impact carbone de sa consommation, méthodologies et limites

Le dernier rapport du GIEC est clair : il est urgent de réduire notre impact carbone ! Alimentation, textile, tourisme, épargne… la consommation des ménages serait responsable de 40 à 70% des émissions de gaz à effets de serre.* Nous avons donc un rôle à jouer, nous, consommateurs. Mais encore faut-il que les enseignes nous donnent l’information suffisante pour faire les bons choix.

Afficher l’empreinte carbone de nos biens de consommation, est-ce la solution ?

Sommaire :

1.Qu’est-ce que l’empreinte carbone d’un objet ?

2.Les différentes méthodes de calcul de l’empreinte carbone

3.La méthode de Carbonfact

4.Attention à la compensation carbone, porte ouverte au greenwashing

5.L’affichage de l’empreinte carbone : une bonne solution mais pas LA solution !

6.L’affichage de l’empreinte carbone dans la mode, que dit la loi ?

 

Qu’est-ce que l’empreinte carbone d’un objet ?

L’empreinte carbone d’un objet équivaut aux émissions de gaz à effet de serre générées sur l’ensemble de son cycle de vie, selon un périmètre et une méthodologie de calcul défini. Cela permet de faire ressortir une donnée objective chiffrée : la quantité – en kg – de CO2 émis par cet objet.

L’intérêt de cette donnée chiffrée est de pouvoir comparer les produits entre eux. Mais encore faut-il qu’il n’existe qu’une méthodologie de calcul. C’est là tout le problème. Aujourd’hui, plusieurs méthodologies permettent de calculer l’empreinte carbone.

Les différentes méthodes de calcul de l’empreinte carbone

Ces différentes méthodes coexistantes compliquent la lecture des consommateurs et risquent de nous faire comparer des choux et des carottes.

Les méthodes les plus connues sont la norme ISO 14067, le Greenhouse Gas Protocol (GHG) et le PAS 2050. Ces modèles standards sont reconnus au niveau international. La méthodologie de l’Ademe, dont s'inspire Carbonfact, est basée sur l’analyse du cycle de vie (ACV) du produit.

Entreprises ou produits

On peut mesurer l’impact carbone d’une organisation ou bien de son produit ou son service. Là encore les méthodes varient. Une entreprise qui aurait de bons résultats selon la méthode règlementaire du bilan Gaz à Effet de Serre ne produira pas nécessairement des produits éco-responsables. Avec Carbonfact, nous mesurons l’empreinte du produit et celui de sa marque.

Le périmètre appliqué 

Scope 1, 2 ou 3 : c’est LA donnée qui fait la différence !  Le scope est le périmètre auquel s’applique la méthodologie.

  • Le scope 1 est le plus restreint, prenant en compte tous les gaz à effets de serre émis directement par l’entreprise (chauffage dans les locaux, véhicules appartenant à l’entreprise…).
  • Le scope 2 intègre les émissions indirectes liées à l’utilisation de l’énergie par l’entreprise.

Dans le scope 1 et 2 on ne retrouve donc pas l’impact carbone des sous-traitants ou des fournisseurs d’une entreprise. On ne retrouve pas non plus l’impact généré par le traitement de ses déchets ni par le transport de ses marchandises. La loi Engagement National pour l’Environnement de 2011 impose à certaines structures** de réaliser un bilan carbone tous les 3 ans. Sa méthode règlementaire ne prend en compte que ces 2 scopes. À date, le cadre règlementaire nous semble insuffisant.

  • Le scope 3 intègre des sous-catégories beaucoup plus larges : achats de matières premières, transport des marchandises, fin de vie des produits... La méthode du MIT et de l’Ademe, dont s’inspire Carbonfact pour son calcul, prennent bien en compte les 3 scopes.

La méthode de Carbonfact

Carbonfact est un inventaire des empreintes carbone des produits de consommation. Avec la vocation de couvrir à terme tous les produits textiles, Carbonfact commence d’abord par les sneakers. La solution, créée par trois entrepreneurs ingénieurs, fait apparaitre l’empreinte carbone d’un produit à partir de l'état de l'art de la connaissance scientifique. Elle utilise la méthode de l’analyse du cycle de vie inspirée de l’Ademe. Les matériaux, l’assemblage, la distribution et la fin de vie sont pris en compte dans son calcul.

Les étapes qui comptent dans le calcul de la note produit

Les matières premières

En moyenne pour des sneakers, 54% des émissions sont dûes à la production et au pré-assemblage des matériaux. Les émissions de matières sont estimées à partir du poids de la paire de sneakers et de la proportion des 2 composants principaux, à savoir la tige et la semelle extérieure .

L’assemblage

L’assemblage des différents matériaux représentent environ 29% des émissions. Le pays dans lequel la paire va être assemblée est donc très important dans la constitution de la note. Une marque qui fabrique dans un pays avec un mix énergétique très générateur de CO2 – comme le Vietnam ou le Sénégal – aura donc des produits « High Carbon ». A l’inverse, le Portugal est un pays qui favorise la « bonne note ».

La distribution

Le trajet de la paire de sneakers jusqu’au consommateur final et son emballage représentent environ 11% des émissions. La méthode d’importation joue donc dans la note : l’avion est plus générateur que le bateau pour les produits importés hors d’Europe.

La fin de vie du produit

Enfin, la fin de vie est prise en compte : elle représente 4% des émissions totales. Si la marque l'a mise en place, la pratique du recyclage permettra de baisser l’empreinte carbone de ses produits.

Dans ce modèle, ne sont pas pris en compte le transport des matières en amont de l’assemblage, ni l’utilisation de la paire. En effet, ces variables ne représentent qu’une infime partie pour cette catégorie de produits.

Attention à la compensation carbone, porte ouverte au greenwashing

Dans la méthode de Carbonfact, nous sommes particulièrement séduit.e.s par 2 éléments :

- son approche sectorielle : on permet comparer deux produits d'une même catégorie. En tant que consommateur.rice, cela nous semble être le plus important pour faire des choix face à un besoin identifié.

- l'exclusion de la compensation carbone pratiquée par une marque dans le calcul. La compensation est l’ouverture à de nombreuses pratiques de greenwashing : une marque peut déclarer un produit neutre en carbone, sans avoir réduit l’impact intrinsèque de sa fabrication. Il lui suffit d’acheter une compensation carbone.

La loi actuelle favorise ce greenwashing ambiant. Le texte initial de la Loi Climat et Résilience adoptée par l’Assemblée Nationale prévoyait l’interdiction pour une marque d’affirmer à tort, dans sa communication, que son produit ou service est neutre en carbone ou sans impact sur l’environnement. Malheureusement, le passage du texte en commission mixte paritaire a autorisé ses allégations de neutralité carbone à la condition de disposer d’une mesure… et d’une compensation carbone.

L’affichage de l’empreinte carbone : une bonne solution mais pas LA solution !

Nous sommes convaincues que l’affichage de l’empreinte carbone d’un produit sur la base d’une méthodologie exigeante, partagée et transparente est nécessaire pour lutter contre le greenwashing ambiant. Mais l’impact carbone ne doit pas être la seule variable à prendre en compte pour juger de l’éco-conception d’un produit.

La prise en compte de l’impact social, du maintien des savoir-faire artisanaux ou de la biodiversité est tout aussi important !

Le travail que réalise notre équipe, aidée d’un comité d’experts, pour sélectionner nos marques partenaires est donc une première étape cruciale. Chaque marque doit, avant de rejoindre Dream Act, passer deux comités et remplir un questionnaire d’impacts. Les conditions sociales sur toute la chaîne de fabrication, la durabilité des produits ou la promotion d’une moindre consommation, sont pour nous des conditions sine qua non pour rejoindre le réseau des marques engagées Dream Act. Ensuite, et uniquement ensuite, nous pouvons démarquer les produits les moins générateurs de gaz à effet de serre parmi ces produits qui ne sont pas là par hasard !

L’affichage de l’empreinte carbone dans la mode, que dit la loi ?

La convention citoyenne pour le climat a proposé de « développer puis mettre en place un score carbone sur tous les produits de consommation et les services ».

« L’étiquette CO2 », affichage environnemental des produits de grande consommation, était d’ailleurs l’un des engagements du Grenelle de l’Environnement. Le ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement Durable et de la Mer avait donc chargé l’ADEME et l’AFNOR de coordonner des groupes de travail et d’élaborer une étiquette destinée à favoriser la consommation responsable des ménages, au regard de la composition carbone du produit et de son emballage.

La loi « Agir contre le gaspillage et pour une économie circulaire » de février 2020 a réactualisé cette ambition avec la mise en place de l’expérimentation d’un affichage environnemental sur le textile, l’alimentaire, l’ameublement, l’hôtellerie et les produits électroniques.

Sur le modèle du Nutriscore, l’idée est de mettre en place une note de A à sur les produits. Ce système de notation expérimental développé par l’Ademe, prend en compte tout le cycle de vie du produit : extraction des matières premières, fabrication, utilisation et fin de vie. Les deux gros critères environnementaux pris en compte sont les émissions de gaz à effet de serre et la pollution de l’eau. Aujourd’hui, cet affichage est volontaire. Il doit se baser sur les données de l’outil de calculs de l’ADEME Base Impacts – comme Carbonfact – et être certifié par Afnor avant sa publication. Un peu d’espoir dans cette mode de brutes…

 

Sources :

*Commissariat Général au Développement Durable, janvier 2010

** Entreprises de plus de 500 salariés (250 pour les entreprises d’Outre-Mer), collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants et établissements publics de plus de 250 agents.

Diane Scemama

Article rédigé par :

Diane Scemama

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