Achat impulsif : comment le marketing manipule notre cerveau ?
Ventre vide, vous salivez devant le paquet de chips. À la caisse, le total s’affiche et vous clignez des yeux. Samedi dernier, c’était moitié moins, non ?!
Rien d’étonnant : notre cerveau réagit différemment selon notre état physiologique et émotionnel. C’est pour cela qu’on achète davantage lorsqu’on a faim. Les marketeurs l’ont bien compris : ils redoublent d’ingéniosité pour manipuler notre cerveau et nous conduire vers l’achat impulsif.
À certains moments de l’année, nous sommes d'ailleurs plus vulnérables qu’à d’autres… Exemple frappant : la Saint-Valentin. Les marketeurs en profitent ! C’est l’occasion rêvée pour nous faire acheter toujours plus : 99% des Français.e.s qui fêtent la Saint-Valentin marquent l’événement par un cadeau.
Nous aussi, on tombe dans le panneau : c’est humain, en fait, c’est biologique. On vous explique ?
SOMMAIRE
1.Le cerveau réagit à différents stimulis
2.Le marketing sensoriel piège le cerveau reptilien
3.Le marketing émotionnel envoûte le cerveau limbique
4.Reprendre les manettes avec le néocortex pour acheter en conscience
1.Le cerveau réagit à différents stimulis
Notre cerveau est divisé en trois zones :
-Le cerveau reptilien garantit notre survie : il régule les fonctions vitales et régit nos réflexes. C’est notre partie instinctive, celle qui apporte une réponse immédiate et mécanique pour combler nos besoins primaires ;
-Le cerveau limbique ou ”cerveau émotionnel”. Grâce à lui, on ressent de la joie, de la tristesse, du dégoût, de la peur et de la colère ;
-Le néocortex, la zone du cerveau la plus développée. Il nous distingue des autres espèces animales par ses capacités à réfléchir, raisonner et créer.
Face à un signal (danger, urgence, besoin), le cerveau veut nous protéger au plus vite. Il alerte en priorité la zone la plus réactive : la zone reptilienne. Puis, c’est au tour de la zone limbique et enfin du néocortex. Ainsi quand on a soif, on peut s’arrêter pour boire. À l’inverse, lorsqu’on vit une émotion très forte, nous ne sommes plus en mesure de réfléchir.
Merci Jamy, mais quel rapport avec notre manière de consommer ?
Acheter responsable implique d’acheter en conscience. Notre néocortex doit pouvoir prendre les commandes sans être interrompu ni par notre instinct (reptilien), ni nos émotions (limbique)...
Sauf que vous vous en doutez, le marketing fait tout pour l'interrompre.
2.Le marketing sensoriel piège le cerveau reptilien
Quelle bonne odeur de pain au chocolat ! C’est tentant, mais ce n’est pas sur la liste des courses… et puis zut, vous méritez bien une petite douceur.
Ce scénario vous semble familier ? Bingo, vous avez été la cible du marketing sensoriel !
Le marketing sensoriel stimule nos cinq sens pour réveiller notre instinct (= le cerveau reptilien). Olfactif, sonore, visuel, tactile ou gustatif… il nous appâte avec des sensations agréables pour déclencher un réflexe. L’odeur agréable génère un gargouillis, notre estomac se réveille, la salive monte et le désir d’achat aussi.
Autre exemple, le papier toilette. Systématiquement présenté au fond du supermarché : pur hasard ? Une manœuvre pour nous faire traverser tous les rayons et stimuler nos sens au passage. On passait en coup de vent et on repart avec des chaussettes toutes douces, un très joli pot de confiture et une lotion à la bonne odeur de rose. Si distrait.e, qu’on en a oublié le papier toilette !
On peut aussi citer votre enfant : lui qui réclame un biscuit après avoir vu une publicité aux bruitages et images aguicheurs.
Certaines marques poussent jusqu’à l’expérience 100% immersive. Elles réveillent les cinq sens en même temps pour transporter le.la consommateur.rice dans un univers agréable, mais sans réel rapport avec le produit promu. On adhère à l’univers de la marque, elle nous reste en mémoire : au moment de consommer, on préférera cette marque qui nous a fait frissonner, plutôt que de faire un choix rationnel.
Aigle – Jeu concours Saint-Valentin 2019.
Aigle offre une nuit insolite sur les toits de Paris. Ciné plein air, cours de cuisine, nuit dans une bulle transparente. Le rapport avec les bottes en caoutchouc ?!
Heureusement, le cerveau reptilien ne cède pas toujours, sinon on serait tous.tes fauché.es… Pour nous faire acheter, les marketeurs cherchent aussi à séduire le cerveau limbique, ce grand sentimental.
3.Le marketing émotionnel envoûte notre cerveau limbique
Vont-ils finir par se retrouver ? Cette question nous taraude pendant 4 minutes.
Monoprix – "Lait drôle la vie"
Dans ce film publicitaire, Monoprix reprend les codes du cinéma pour mettre en scène ses emballages dans une romance. L’objectif : susciter une émotion chez le.la consommateur.rice.
En effet, moins docile que le cerveau reptilien, notre zone limbique a besoin de temps pour être charmée. Un travail d’endurance pour hérisser les poils, décrocher un sourire ou déclencher un sursaut. Pour nous émoustiller, le marketing émotionnel utilise le storytelling : une histoire captivante, romancée, touchante ou poétique… dans lequel on fera subtilement du placement publicitaire ! Le cerveau limbique associe alors ce joli conte à la marque, et le tour est joué ✨
Encore une fois, on détourne l’attention des qualités du produit. On lui confère des pouvoirs magiques pour amadouer notre cerveau limbique : “ceci n’est pas juste un *pack de lait* : ce pack de lait permet de retrouver son amour de jeunesse !”
On s'écarte de la trivialité du produit et on omet son origine, ses conditions de fabrication, ses caractéristiques sanitaires, son impact écologique… Il devient attractif, voire touchant. Nous éprouvons de la sympathie pour la marque et sommes persuadé.e.s de ses bienfaits. Belle illusion : comment se douter de ses mauvais côtés?
Monoprix – Opération Saint-Valentin 2018.
Pour la Saint-Valentin (2018), Monoprix met à disposition de sa clientèle des faux packaging pour l’aider à faire le premier pas. Des emballages fabriqués pour… ne rien emballer, si ce n’est notre cerveau émotionnel qui se dit “trop mimi!”. Mimi, oui, mais Monoprix : c’est un supermarché ou un site de rencontre ?!
Vous pensez : “Moi, je ne mords pas à ces appâts marketing. J’ai du bon sens ! ” Le bon sens ne suffit pas : notre capacité de discernement aussi présente des failles. Connaissez-vous les 8 principaux biais cognitifs ?
Fort heureusement, vous pouvez reprendre les commandes pour acheter en conscience. Comment ?
Le marketing n’a rien de pervers en soi. Comme tout, c’est son usage qui peut être dommageable. Certaines marques privilégient le marketing engagé.
L'objectif du marketing engagé ? Vous aidez à acheter en conscience pour consommer moins et mieux.
Plus concrètement,
-Le marketing engagé place le produit au coeur du discours. On l’a vu plus haut, le cerveau est vite distrait par ses sens, ses émotions et ses croyances. Pour mesurer la pertinence d'un achat, nous avons besoin de se recentrer sur les qualités intrinsèques du produit. Autrement dit, ses propriétés et non des bénéfices fantasmés.
Typologie - Affiche sérum anti-cerne
Dans le marketing engagé, le discours est construit sur le produit même : son utilité réelle, son impact social et environnemental. Il utilise le storytelling pour clarifier les étapes de fabrication ou l’histoire de l’initiative éthique.
Dream Act - L'histoire du linge de table
-Le marketing engagé exige la transparence. Plus on en dit sur le produit, plus on facilite le travail d’analyse du cerveau. Fabrication, matières, cycle de vie, entretien… Ces informations à disposition, il est plus facile d'arbitrer ! Nous sommes alors en mesure de faire des choix de consommation éclairés.
Dream Act - Détail des impacts du Kit économie d'eau Oopla
En résumé :
Le marketing tend des pièges à nos sens et nos émotions. Tels des pantins, nous éprouvons une pulsion à l'achat. Et c'est ici que le marketing engagé devient intéressant ! Il aide votre cerveau à retrouver ses facultés de raisonnement : vous prenez conscience de vos achats et de leurs réels impacts.
Observez vos mécanismes et vous ne tomberez plus dans le panneau. Pour commencer, vous ne ferez plus les courses la faim au ventre, promis ?
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Article rédigé par :
Lorraine Rasanayagam
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